Lépidoptères : ordre d’insectes dont le corps est recouvert d’écailles
Zoé a 5 ans et elle déteste les araignées. Elle frappe le sol et elle crie. Elle les tient éloignées. Elle ne veut pas qu’elles lui collent.
Basile a 5 ans et il aime les insectes. Il essaye de se les attacher. L’été, il les tient très près sous sa loupe. Il les fume et les renifle. Il ne veut pas qu’ils lui échappent.
Zoé avait chaud. Elle remonte les manches de sa veste. Ça la pique. Elle commence à gratter. Dans le pli du coude elle creuse sa peau jusqu’à faire un trou. Dans le trou, il y a une membrane ; et sous la membrane, de fines écailles.
Basile s’était rafraîchi. Il repose son verre avant de se remettre à l’ouvrage. D’abord gêné par la réflexion du soleil, il voit ensuite la fine fumée. Il lève sa loupe : « Zoé, reste tranquille. Tout ira bien. »
Carine Bargueno
Carine Bargueno est psychologue clinicienne et travaille dans un service de pédopsychiatrie. Elle reçoit des enfants séparés de leurs parents sur décision judiciaire et ayant vécu des traumatismes relationnels précoces. « Sous la peur, il y a toujours le monstre » se propose d’explorer le jeu de miroir entre la peur et soi-même. Tout fonctionne comme si derrière l’objet réel de la peur se cachait une part de soi-même, errante et mal définie, que constitue le monstre que l’on porte en soi. Ce monstre est tout autant capable de créer l’émotion de peur pure que de se transformer et d’incarner une partie de soi que l’on arrive pas à aimer. Du désamour et de la honte vient ce monstre-là. Il arrive sous la peau, par notre nez, notre bouche, nos oreilles et nos yeux, mais on lutte pour le tenir à l’extérieur de nous. L’histoire de Zoé et Basile invite à effleurer délicatement la fine surface de notre miroir intérieur.